Derrière une façade et une enseigne qui se veulent discrètes, se cachent une vie intense, une diversité humaine, qui font la spécificité de « La Boîte aux Lettres ». Le calme de la rue , dès l’ouverture de la porte, se trouve confronté à l’activité, sereine et studieuse, de personnes heureuses d’être là et d’y apprendre non seulement la langue française mais aussi un art de vivre très fraternel, sans hiérarchie visible, où tout le monde se connaît, ou apprend à se connaître. On y fraternise sans éclat, parle de son histoire propre qu’elle soit locale ou d’ailleurs dans ce vaste monde.
Un seul point réunit tous ces gens : leur volonté d’acquérir la maîtrise du français pour après pouvoir se mouvoir, comprendre et faire comprendre ce qu’ils sont, leurs désirs et leur volonté de trouver une place dans cette société occidentale si prompte à accueillir – à rejeter aussi.
Tous sont à la recherche d’un certain bonheur et savent qu’ici c’est difficile – mais ce qui m’a particulièrement frappé, c’est cette humanité qui les habite. Télévision, presse nous parlent d’un monde entier de luttes, de guerres, et là, au 154 rue Cazault, dans cette ambiance relativement douce, nous rencontrons des hommes, des femmes, blancs, noirs, jaunes, qui expriment des sentiments simples, qui ont connu des vies très difficiles et parlent de leur famille, de leur parents, de leurs enfants, comme nous. Oui, comme nous ! Et c’est en cela que je suis reconnaissant à « La Boîte aux Lettres » : de m’avoir fait connaître cette expérience.
Je savais que nous étions tous frères, là j’en suis intérieurement convaincu. J’ai souvent souhaité retracer le chemin de ma vie. Parfois, je n’en ai ni l’envie ni le courage… Après tout « ma vie » n’est ni plus ni moins semblable aux autres. Peut-être ai-je un peu plus conscience que d’autres d’avoir vécu à la charnière de deux conceptions de l’existence, l’une agonisante, l’autre ne sachant pas où elle va – cherchant péniblement un chemin qui doit s’adapter à une sorte d’homme « nouveau » ? A la recherche du Bonheur, d’un Bonheur fait de technologie, de liberté sans contrainte, et curieusement du rejet de l’autre à la manière des tribus d’antan ou contemporaine d’Afrique.
Récemment, en relisant un texte sur l’arrivée des hordes du Nord au XIème siècle de notre ère dans notre pays entre Sées et les marches du Maine, j’ai retrouvé les mêmes mots qui décrivaient les combats du Rwanda ou du Congo dit le Zaïre. Le raccourci m’a interrogé sur cette recherche de l’homme moderne, pacifique, ouvert à la Science, empli de certitudes qui curieusement n’emploie que des mots guerriers pour désigner l’adversaire qui pense autrement – démocratie, droits de l’homme, référendum, sont des mots à la mode ! Le peuple seul sait où il va – nous venons d’un monde où l’homme fut exploité, éclairé seulement par les riches du pouvoir !
Et si les lanternes des actuelles tribus n’étaient aussi qu’une seule lumière – un leurre… A la vue de toutes ces lueurs, je me surprends à penser qu’en fait tout ça n’est qu’éternel recommencement. Seule la peur de se faire mal freine ces esprits ardents.
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